Savez-vous quels sont les sites ou applications que vous utilisez le plus ? Plus on passe de temps derrière un ordinateur, et plus il est intéressant de le savoir.
La réponse à cette question me donne des pistes intéressantes pour analyser la gestion de ma ressource la plus précieuse : mon temps. Chaque matin, je jette un œil attentif à la liste des outils que j’ai le plus utilisés la veille. Et depuis quatre ans, c’est toujours le même site qui arrive en tête :
S’il y a bien un chiffre qui ne ment jamais, c’est celui du temps passé. Depuis 2017, je passe l’essentiel de mes journées dans Notion. La raison est simple : c’est devenu une extension de mon cerveau.
Mon second cerveau
Même si vous ne connaissez pas déjà Notion, il y a de fortes chances que vous utilisiez plusieurs applications que je qualifierais de « gestionnaires d’informations ». Des outils qui vous aident à capturer, trier et organiser vos idées. À mémoriser ce qui vous passe par la tête. Tout ce dont vous avez besoin pour votre travail ou votre vie perso.
Ils peuvent prendre la forme d’un gestionnaire de tâches (Things ? Todoist ? Asana ?), d’un outil de prise de notes (Bear ? Evernote ? Paper ?), d’un logiciel d’écriture (Ulysses ? iA Writer ? Word ?), ou bien de fichiers (feuilles de calcul ? Présentations ? PDF ?) et dossiers présents sur votre disque dur.
Chez la plupart des gens, l’utilisation de ces outils débouche sur une accumulation bordélique de documents, éparpillés à de multiples endroits et dans des formats différents. L’information est morcelée, difficile à retrouver, et de moins en moins exploitable avec le temps.
Mais si vous utilisez ces outils intelligemment, ils peuvent transformer ce brouhaha intellectuel (qui vous empêche de penser clairement) en un allié incontournable de votre quotidien. Avec une stratégie consciente et réfléchie, ils peuvent agir comme un second cerveau.
Ils deviennent cette extension de votre esprit qui vous permet de retrouver n’importe quelle information en quelques secondes. À chaque fois que vous tombez sur une information intéressante, vous savez comment la capturer et où la ranger. Et lorsque vous en avez besoin plusieurs années plus tard, vous savez exactement comment mettre la main dessus.
Ce second cerveau vous enlève la pire des charges mentales : devoir vous souvenir de tout. C’est une externalisation de votre mémoire. Comme si vous aviez un assistant personnel à la mémoire infaillible, toujours disponible pour vous servir vos meilleures idées au meilleur moment. Vous pouvez ainsi vous concentrer sur le moment présent.
Ce problème, tous ceux qu’on appelle les knowledge workers y sont confrontés. Du coup, le marché est rempli d’apps qui tentent — de façon plus ou moins ciblée — de traiter cette question complexe. En fonction de leur histoire, elles s’y attaquent avec un angle différent : tâches, notes, projets, bases de données, écriture, etc.
C’est là que Notion entre dans la danse, avec une vision un peu différente. Son pari ? Tout gérer dans un seul et unique outil.
Le meta-défi de la solution « tout-en-un »
J’ai toujours été très méfiant avec les solutions « tout-en-un ». En voulant jouer sur tous les tableaux, elles finissent souvent par être médiocres sur chacun d’entre eux. La featuritis curve, ça vous parle ?
J’ai tendance à préférer les outils qui ne savent faire qu’une seule chose, mais qui l’exécutent à la perfection. Plus il y a de fonctionnalités, et plus les outils ont tendance à perdre en efficacité, en simplicité.
C’est là où Notion m’a retourné le cerveau. Notion, c’est l’exception qui confirme la règle. C’est une anomalie dans le paysage des outils-qui-font-tout. Car sur toutes les verticales qu’il traite, il arrive très souvent à faire mieux que les outils plus spécialisés. Et pourtant, ces verticales sont très nombreuses. Selon vos problématiques, vous pouvez très bien considérer Notion comme :
- une application de prise de notes ;
- un logiciel d’écriture ;
- un client Markdown ;
- un outil de gestion de projet ;
- un wiki ;
- un outil de communication asynchrone ;
- une app de transfert de fichiers ;
- un tableur ;
- un outil de documentation ;
- une base de connaissances partagée ;
- un utilitaire de bases de données ;
- un intranet (oui, ce mot existe toujours) ;
- un CMS ;
- et même tout ça à la fois.
J’en oublie sans doute. Réussir à décrire tout ce que sait faire Notion est un petit défi en soi. D’autant que toutes les fonctionnalités sont utilisables en équipe, avec une couche de collaboration en temps réel aussi puissante que celle de Google Docs ou Figma. Mais là où Notion est époustouflant, c’est dans l’exécution. Au lieu de souffrir de son côté généraliste, il parvient à viser juste sur tous les sujets auxquels il s’attaque.
Le niveau de finition du produit est tellement fou que pour chacune de ces fonctions ou presque, il propose une meilleure expérience que la plupart de ses concurrents verticaux. Imaginez si votre médecin généraliste était aussi le meilleur chirurgien, le meilleur cardiologue, le meilleur ophtalmo et le meilleur gynéco. C’est un peu l’impression que j’ai en utilisant Notion.
Mieux encore : il arrive à faire en sorte que cette multitude de fonctionnalités n’entrave pas la simplicité du produit, qui reste incroyablement facile à prendre en main. Il est élégant, agréable, bien pensé et prodigieusement flexible. Ce qui en fait l’outil idéal pour accueillir votre second cerveau, et gérer au mieux votre matière grise.
En étant cette exception qui confirme la règle, il décuple la puissance du « tout-en-un » de façon exponentielle. Aucun autre logiciel ne peut gérer autant d’aspects différents de votre vie avec une telle cohérence. C’est ce qui en fait un chef-d’œuvre d’UX à mes yeux. Et un gros doigt d’honneur à la featuritis curve.
Pour comprendre comment Notion est arrivé à un tel niveau, il faut s’intéresser à son histoire. L’histoire du produit, bien sûr, mais surtout celle de l’entreprise.
18 heures de Figma par jour pendant un an
Quand on voit le succès de Notion aujourd’hui, on est loin de s’imaginer le parcours du combattant qu’ont dû mener ses fondateurs pour en arriver là.
Le projet est bien plus vieux qu’on pourrait le croire : il a débuté en 2013. Au bout de deux ans, les fondateurs commencent à manquer d’argent pour tenir le train de vie de San Francisco. Le produit n’est pas stable, plante régulièrement, et ne trouve pas son public. Notion est parti pour suivre le même destin que l’immense majorité des start-up : mourir. Avant même d’exister réellement.
En 2015, les fondateurs Ivan Zhao et Simon Last activent donc le mode survie. Ils quittent San Francisco, et s’isolent dans un lieu où ils ne connaissent personne : Kyoto. Ils ne parlent pas japonais, et vont pouvoir s’enfermer toute la journée pour bosser sur le produit. Leur dernière carte pour essayer de le sauver.
Neither of us spoke Japanese and nobody there spoke English, so all we did was code in our underwear all day.
Ivan Zhao, CEO
Ils reconstruisent tout de zéro. À ce moment-là, Ivan Zhao commence à remonter dans la liste des utilisateurs de Figma les plus actifs au monde, avec des journées à plus de 18 heures passées dans l’app (!). Pendant un an, les deux fondateurs ne cessent de coder, repenser l’interface et multiplier les itérations.
Pour concrétiser ce qu’ils ont en tête, tout se joue évidemment sur l’UX. Bousculer à ce point le statu quo demande forcément un peu d’abnégation. Et un niveau d’attention aux détails complètement délirant, pour ne pas rester sur des euphémismes.
Our general philosophy is to go crazy with permutations. If the taste is there, which you can grow by studying typography and the giants of industry, you can churn out versions until you find the best one.
Ivan Zhao, CEO
En 2016, après des mois de crunch, ils arrivent à la première version de Notion (1.0), prête à affronter le jugement exigeant de tous les geeks de productivité dans mon genre. Il aura fallu ce niveau d’obsession pendant une année entière pour concevoir les bases du produit que nous connaissons aujourd’hui.
Mais au moins, ces efforts n’auront pas été vains. Car la suite des événements va donner à l’entreprise une trajectoire bien différente de celle des premières années de galère. En quelques semaines, ils explosent sur Product Hunt et atteignent 1 million d’utilisateurs, à la seule force du bouche-à-oreille. Les spécialistes perçoivent immédiatement la puissance de Notion, certains n’hésitant pas à parler du produit comme une « étape majeure dans l’histoire de l’UX ». C’est sans doute encore tôt pour le dire, mais après avoir passé quelques milliers d’heures dessus, j’ai du mal à ne pas être d’accord.
D’ailleurs, c’est un peu l’ambition d’Ivan Zhao. Il veut mettre Notion entre les mains de tout le monde, et notamment les profils les moins techniques (comme ses amis artistes pour qui il créait des sites web). À l’image de ce qu’a réussi à faire Microsoft dans les années quatre-vingt-dix avec la suite Office : des outils toujours centraux dans la vie des gens d’aujourd’hui (une fois sorti de la bulle technologique dans laquelle vous vous trouvez certainement si vous lisez ces lignes).
L’objectif ultime est encore plus ambitieux : permettre aux non-développeurs (comme moi) de créer leurs propres applications. De fabriquer leurs propres outils aussi facilement qu’en déplaçant des blocs. Un peu comme des LEGO. Depuis la version 2.0 (mars 2018) qui a introduit les bases de données, on commence sérieusement à s’approcher de cet objectif.
What would the world look like if everybody had the perfect tool that perfectly fits their needs? If everybody could almost become a software maker without coding? Build their own perfect tool for whatever problem they have?
Ivan Zhao, CEO
Le temps passe, et la fusée continue son ascension. Avec des mises à jour aussi régulières que bluffantes, l’équipe continue de prouver qu’elle exécute à merveille. Le produit s’améliore de jour en jour, et les nouveaux utilisateurs continuent d’affluer par millions.
En avril 2020, nous sommes en plein Covid-19. Et quand bon nombre de boîtes sont ravagées par le virus, Notion lève 50 millions de dollars. Valorisation : 2 milliards. Autant dire que depuis le temps, ils ont pu revenir à San Francisco (dans des locaux qui traduisent bien leur singularité), et embaucher plusieurs dizaines de personnes. Ils semblent maintenant parés pour les dix prochaines années.
Cette énorme levée de fonds est d’ailleurs intéressante, parce qu’elle marque à mon sens une certaine ambivalence avec l’ADN de Notion.
Tools for Thought
Quand j’ai découvert Notion en 2017, j’ai tout de suite senti quelque chose de singulier. Il y a cette direction artistique unique, qui tranche assez radicalement avec ce qu’on a l’habitude de voir pour ce genre de logiciels. Des illustrations qui nous embarquent dans un univers qui n’a pas grand-chose à voir avec des outils comme Evernote (ou pire, Roam Research).
Les inspirations de Notion sont aussi bien artistiques que technologiques. Elles ont permis de construire une magnifique identité de marque, et qui va au-delà du look and feel du produit. Cette phrase a beau me donner l’impression d’écrire un publireportage, il s’est vraiment passé quelque chose lorsque j’ai lu leur page /about pour la première fois. J’ai découvert qu’ils savaient écrire, mais j’ai surtout été inspiré par leur vision du futur du travail.
On sent que leur mission dépasse le simple cadre d’un produit. Qu’ils réfléchissent en profondeur à l’histoire des outils numériques que nous utilisons, pour mieux inventer ceux de demain. Dans leur prose, on trouve souvent des références aux pionniers de l’informatique comme Alan Kay ou Douglas Engelbart. Les premières vidéos de leur chaîne YouTube sont des reportages passionnants sur d’autres acteurs clefs de l’industrie comme Andy Hertzfeld (un des créateurs de Macintosh) ou Louis Pouzin.
Chez Notion, tous les designers savent coder. Ils aiment résoudre les problèmes sous l’angle holistique de l’expérience utilisateur. Ils prennent du recul en s’inspirant des légendes de l’informatique des années soixante ou soixante-dix. Une époque où le champ des possibles était tellement grand que les meilleures idées n’étaient pas encore trop parasitées par le marketing.
Ivan Zhao est bien loin des clichés du startupeur californien. Vous trouverez peu de chose sur lui sur Internet. Son compte Instagram ressemble plus à celui d’un étudiant en école d’art, qu’à celui du CEO d’une des start-up les plus en vogue de la vallée. En lisant ses rares interviews, j’ai compris qu’il ne faisait pas les choses comme tout le monde.
One thing I personally do is go on Dribbble and look at what’s popular. And then I consciously don’t do that.
Ivan Zhao, CEO
En 2019, quand les investisseurs se battent pour entrer au capital de Notion, Ivan Zhao les refuse tous poliment. Il préfère continuer à parler à ses clients, coder, designer, et perfectionner son produit.
When the work management software startup Notion moved offices recently, it didn’t update its address on Google Maps. The reason: VCs were literally knocking on its doors to discuss potential investments.
Il aura quasiment fallu attendre cette levée de 50 millions de dollars pour apercevoir une photo de lui — ou plutôt de ses tongs.
Si vous connaissez l’histoire des entreprises tech, vous savez que les rachats — et les levées de fonds qui les précèdent — des produits à succès ne sont pas toujours une bonne nouvelle pour nous, clients des produits en question. Si c’est pour qu’un outil génial se retrouve flingué par l’acheteur (coucou Sunrise, Wunderlist et tous les autres), on préfère largement quand le produit est financé par ses clients.
Le parcours de Notion (qui est d’ailleurs payant depuis le début) montre que les grosses levées ne sont pas vraiment dans leur ADN. Plusieurs articles font part de leur volonté de rester une équipe de taille réduite, quand ils auraient pu embaucher des centaines de personnes.
Sometimes I joke, “Moby Dick was written by one person.” Three of (Herman Melville) probably wouldn’t be much faster. Software is a lot like that. Without understanding what you’re trying to do, adding more people will actually slow you down.
Ivan Zhao, CEO
Quand on voit comment ils se sont comportés jusque-là, ce tour de financement amène forcément à se poser quelques questions. Même si les fonctions d’exportation de Notion m’ont convaincu qu’une migration vers un autre outil ne serait pas la fin du monde, je serais quand même bien malheureux de devoir arrêter de m’en servir, tant c’est devenu la maison idéale pour mon second cerveau.
Avec autant d’argent, on peut au moins être sûr que le produit ne va pas mourir du jour au lendemain. Ce qui est quand même important pour un outil de cette trempe, devenu aussi central dans ma vie. Zhao a même annoncé qu’ils avaient maintenant assez d’argent « pour les 10 prochaines années ». Ça laisse effectivement de quoi voir venir, surtout s’ils continuent à tenir la charge de leur croissance folle.
Pour l’instant, cette hypercroissance n’a pas eu de répercussions négatives sur la qualité du produit — c’est même plutôt le contraire. Ça donne confiance, mais je vais évidemment suivre ça de près. Je n’ai de toute façon pas le choix car comme vous le savez maintenant, je passe ma vie dans Notion.
We are a diverse group of people interested in computing, history, art, alternative programming languages, and skateboarding.
L’histoire de Notion reste à écrire. Mais jusqu’ici, elle m’a presque autant fasciné que le produit lui-même. Pour être honnête, elle a sans doute contribué à mon attachement pour ce dernier. Il faut dire que tout ce qui sort des cerveaux de Notion transpire la qualité, le souci du détail et les choix consciencieux. Tout ce qu’il faut pour me donner encore plus envie d’aimer le produit.
Prenez par exemple leur moteur de recherche, l’un des trucs les plus importants pour un wiki. Il devient de plus en plus crucial à mesure que votre équipe grossit, ou que votre base de connaissances s’étoffe. Or, il faut bien le dire, cette recherche a longtemps été le plus gros point faible de Notion. Ce pourquoi j’ai parfois hésité à le recommander à certaines boîtes pour leur wiki, notamment si elles avaient déjà beaucoup de contenu. Elle était lente, pas toujours très précise, et l’interface n’était pas au top.
Alors ils ont traité ce problème avec le niveau de réflexion qu’il mérite. Quitte à ce que ça prenne un peu de temps. Ils ont embauché la bonne personne, et lui ont donné l’espace pour tout repenser depuis le début. Résultat ? Le nouveau moteur de recherche, arrivé en janvier 2020, est une pure merveille.
Pour les plus curieux, voici quelques détails techniques intéressants sur la refonte de la recherche. Ils montrent bien le niveau d’attention que cette équipe porte à l’expérience utilisateur.
En une mise à jour, la principale critique qu’on pouvait faire à Notion jusque-là s’est envolée. Il ne me reste plus que du bien à dire de ce produit, comme beaucoup d’autres l’ont déjà fait avant moi. Mais j’aimerais entrer dans les détails de ce qui fait à mes yeux tout l’intérêt de Notion : sa flexibilité.
Organisation de l’information
Je suis sûr que vous êtes déjà tombé sur une feuille Excel où l’auteur essayait tant bien que mal de faire cohabiter un bloc de texte (genre des instructions) avec le tableur lui-même (genre son simulateur de la mort). C’est une bonne illustration du phénomène que je vais aborder ici.
Quel que soit leur angle (prise de notes, gestion de projet, liste de tâches, wiki, tableur, etc.), la plupart des outils qui gèrent de l’information ont tendance à « imposer » une certaine structure, propre à l’outil lui-même.
Par exemple, si vous utilisez Trello, vous serez forcément enfermé dans un certain paradigme pour structurer l’information :
Dans Evernote, ça prendrait plutôt cette forme :
Si vous décidez de faire une FAQ publique avec Zendesk, vous devrez classer vos articles d’aide en suivant l’arborescence suivante :
Bref, vous voyez l’idée. Chaque outil décide arbitrairement d’une certaine façon d’organiser l’information. Quand vous commencez à l’utiliser, vous devez en adopter la structure. Généralement, ça n’est pas bien gênant au départ.
Les problèmes arrivent quand — plusieurs mois ou années plus tard — la structure choisie au départ ne correspond plus à vos besoins. Et là, selon l’outil et vos nouvelles envies, la refonte de cette structure peut vite devenir un enfer. Le niveau de pénibilité est généralement proportionnel à la quantité du contenu à migrer dans la nouvelle structure, ou le nouvel outil. C’est le moment où vous regrettez vos choix initiaux. Ah, si j’avais su !
En fait, l’outil et la structure que vous choisissez au départ vont fortement conditionner le futur de votre base de connaissances, alors même que vous n’avez aucune idée de ce qu’elle pourrait devenir ! Autrement dit, vous devez prendre cette décision importante au pire moment. Ces choix, pourtant peu cruciaux en apparence, peuvent vous plonger dans une véritable dette documentaire, si j’ose dire. Pire que ça : ils entravent votre prise de notes et nuisent à la fluidité de votre second cerveau.
Après avoir vécu quelques mauvaises expériences du genre, on fait les choses différemment. Ça devient une décision stratégique. On se retrouve à choisir avec précaution un outil et une structure qui nous conviennent, en essayant d’anticiper au maximum nos besoins futurs. Pour trouver LA bonne architecture qui nous suivra sur le long terme.
Le problème, c’est que notre cerveau ne fonctionne pas comme ça. Au départ, on a juste envie de jeter nos idées sous une forme déstructurée, sans avoir à réfléchir à une quelconque architecture. On veut simplement écrire nos idées quelque part, les capturer avant qu’elles ne disparaissent. Et la structure idéale se construit avec le temps : en tâche de fond, au fur et à mesure de la maturité de nos idées.
Comment pouvez-vous savoir si ce que vous considérez aujourd’hui comme une simple case à cocher à l’intérieur d’une carte Trello ne va pas, d’ici trois ans, devenir la colonne d’un tableau, une page à part entière, ou même une grosse base de données ? Si ça vous arrive, vous serez bien embêté au moment de vous détacher de la structure et l’outil choisi au départ, pour l’adapter à vos nouveaux besoins.
La vraie force de Notion : sa flexibilité infinie
C’est là où l’approche modulaire de Notion frappe un grand coup. Grâce à elle, vous pourrez facilement itérer sur la manière de structurer vos connaissances, au rythme de leur évolution. Le système de blocs permet aisément de convertir un élément (paragraphe, titre, citation, bullet point, page, etc.) d’un format à l’autre.
Des lignes de texte peuvent instantanément devenir des pages, des titres, des cases à cocher, des éléments d’un tableau Kanban ou d’une base de données plus dense. Comme dans un WorkFlowy ou une Mindmap, le niveau d’indentation n’a pas de limite : vous pouvez créer autant de sous-pages que vous voulez. La flexibilité est infinie.
Si je reprends mes schémas précédents et que je les adapte à Notion, voici la forme que ça prendrait :
Plus sérieusement, cette approche modulaire est vraiment incroyable. Grâce à elle, vous pourrez presque dire adieu à vos problèmes de dette documentaire. Vous ne serez plus jamais enfermés dans une arborescence qui ne vous plaît pas. Vous pourrez réorganiser vos documents/pages/notes/bases de données en fonction de ce qui convient le mieux à votre cerveau à l’instant T. Et si vous vous trompez, vous pourrez facilement revenir en arrière. Puis faire de nouvelles tentatives jusqu’à trouver la bonne formule.
Je ne compte plus mes idées de projet qui ont commencé comme un simple bullet point au milieu d’une page bordélique, pour terminer 3 ans plus tard comme une énorme base de données avec moult paramètres, des calculs automatiques, de multiples tags ou autres façons de trier l’information. La base de données que j’utilise pour mes jeux vidéo est un bon exemple.
Je ne serais jamais arrivé à un résultat aussi complet et satisfaisant si j’avais dû décider de la structure dès le départ. Ça s’est fait progressivement, grâce à la souplesse de Notion. L’outil a accompagné le niveau de sophistication de mes données, à mesure de l’évolution du projet.
Pour dire les choses clairement, je n’ai jamais vu un tel niveau de flexibilité dans une application web. C’est à mes yeux la plus grande force de Notion. Quand une telle flexibilité se marie à une interface aussi agréable à utiliser, c’est le jackpot. D’un seul coup, tout devient possible.
Le revers de la médaille de cette souplesse extrême, c’est qu’il devient presque difficile d’expliquer à quoi sert Notion à une personne qui n’en a jamais entendu parler. On peut tellement TOUT faire avec, qu’on ne se sait même plus par où commencer. Trello avait déjà rencontré ce genre de problème au moment de sa popularisation. Mais là, c’est encore un cran au-dessus.
Heureusement, Notion a bien conscience du problème et y répond de la meilleure des manières : des templates aux petits oignons, directement inclus dans le produit. Vous pouvez facilement les intégrer à votre propre espace, puis les personnaliser à votre guise.
En plus de la liste — très bien fournie ! — de modèles proposée par Notion, vous pourrez également trouver de belles inspirations sur les sites comme notion.vip, notionpages.com ou notioneverything.com. YouTube regorge aussi de productivity nerds qui peuvent passer des heures à vous expliquer leur Notion Setup 2020.
Mon utilisation de Notion
Si vous avez lu mon article sur la prise de notes, vous avez déjà une bonne idée de la manière dont j’utilise Notion. Il intervient peu durant la phase de capture, mais c’est le pilier de mon organisation pendant la phase 2, au moment de traiter et organiser mes idées.
Concrètement, si j’ai décidé de faire quelque chose de ma note capturée, il y a de fortes chances que ça termine dans une page Notion.
- Soit dans une page existante, lorsque la note s’intègre à une réflexion déjà en place dans mon second cerveau. Exemple : une idée à creuser pour un projet en cours.
- Soit dans une nouvelle page, si c’est une information fraîche qui n’entre pas vraiment dans le cadre d’un projet existant. J’ai simplement besoin de l’archiver dans ce que j’appelle parfois mon Google personnel.
Si vous ne savez jamais comment organiser vos notes et documents, je vous conseille de jeter à œil à la méthode PARA de Tiago Forte. C’est un framework plutôt solide pour organiser ses documents numériques. Il vous sera utile si vous partez de loin. J’en utilise une sorte de variante personnelle, et Notion est parfait pour la mettre en pratique.
Je n’irai pas jusqu’à vous présenter les moindres détails de mon propre espace de travail Notion, mais j’ai quand même quelques exemples sympathiques à vous partager. Au cas où vous seriez venu pour ça. Et parce que c’est quand même un peu le but de ce site. 👀
Personal CRM
Je ne vais pas vous détailler ici les bénéfices incroyables que vous aurez à utiliser un personal CRM. Les gens dont c’est le métier (genre Folk) feront ça mieux que moi. Après avoir testé pas mal d’applications du genre, il se trouve que Notion me convient très bien pour gérer le mien comme je l’entends. C’est encore la flexibilité qui fait mouche.
La plupart de mes contacts (pro/perso) ont donc leur petite fiche dans Notion. Elle ressemble à peu près à ça :
L’intérêt d’avoir toutes ces informations dans Notion, c’est que je peux très facilement faire le lien avec d’autres idées. Des projets en cours qui seraient à un autre endroit de mon second cerveau, par exemple. C’est là où le côté « tout-en-un » prend tout son sens.
Mais ce que j’aime encore plus, c’est que chaque contact possède une URL unique — comme toutes les pages Notion. Ce qui veut dire qu’à l’aide de mon meilleur ami Alfred, je peux accéder à n’importe quelle fiche en une seconde :
Suivi d’habitudes
Les trackers d’habitudes sont monnaie courante sur le marché des apps de productivité. Certaines comme Streaks font même du très bon boulot. Pour ma part, c’est aussi un sujet que je traite directement avec Notion.
Une fois de plus, la souplesse de Notion m’a permis de construire cette app exactement selon mes envies (et pas celle d’un développeur tiers, aussi doué soit-il). Je peux surtout la faire évoluer au gré de mes besoins, sans dépendre de personne.
Tous les jours, je prends trente secondes pour faire un point sur ma liste de petites habitudes quotidiennes, en cochant ce à quoi j’ai réussi à me tenir. Tout est automatiquement archivé dans une grosse base de données qui me permet de garder un historique complet de ma progression.
Backlog et collection de jeux vidéo
J’ai fait un article entier là-dessus. Pas la peine de m’étendre davantage ici.
Base de données d’articles, archive de mes lectures
Le Web Clipper de Notion me permet de capturer en un clic tous les articles que je lis. Au fil du temps, j’ai ainsi pu me constituer une bonne base de lectures instructives, accessibles à tout moment. C’est valable pour n’importe quelle page web que j’ai envie d’archiver (principalement des articles, mais pas que), sans devoir prier pour qu’elle soit toujours en ligne d’ici quelques années.
C’est toujours un bonheur de retrouver en quelques secondes un contenu qui m’avait particulièrement marqué plusieurs années auparavant. Surtout depuis que le moteur de recherche de Notion marche du tonnerre.
Leur Web Clipper n’est pas encore parfait — certains préfèrent celui d’Evernote. Il m’arrive de corriger les ratés avec quelques copier-coller manuels, mais j’en suis globalement très satisfait. Ça marche évidemment sur mobile.
Base de données de livres
J’ai une page « Livres » qui ressemble à ça :
C’est un peu mon GoodReads personnel, sans la partie « sociale ». Chaque livre étant lui-même une page Notion, j’en profite pour compiler quelques données intéressantes. Ça commence avant la lecture : qui a recommandé ce livre ? Quand ? Où ? Pourquoi ? Les réponses à ces questions sont bien utiles au moment de décider à quel livre on s’attaque.
Une fois que j’ai terminé un livre, j’en profite pour importer mes surlignements (le grand intérêt de la lecture numérique, n’est-ce pas) et ajouter mes notes dans cette même page. Les voilà au bon endroit pour agrémenter mon second cerveau.
Gestionnaire de tâches
J’utilise aussi Notion pour gérer une partie de mes tâches quotidiennes, et garder une trace de ce que j’accomplis tous les jours. Je me suis construit une app qui fait exactement ce que je veux. Elle s’appelle TewDew, et j’ai détaillé tout ça dans un article.
Suivi de budget, dépenses et abonnements
En bon amateur de finances personnelles, je possède évidemment ce que les anglophones appellent un subscription tracker. Il s’agit d’un tableau qui répertorie l’ensemble de mes dépenses récurrentes.
Les outils qui font ça sont surtout pensés pour avoir une meilleure vision de vos abonnements mensuels (du genre Netflix et compagnie), un modèle économique de plus en plus répandu. J’essaie d’être encore plus précis et exhaustif, en intégrant l’ensemble de mes sorties d’argent. Quoi de plus approprié qu’une base de données Notion pour suivre tout ça proprement ?
L’intérêt est de pouvoir trier/filtrer les données à ma guise, pour accéder rapidement à toutes les infos qui m’intéressent. La plupart des gens n’ont pas une très bonne vision de ce que leur coûte tel ou tel service. On ne peut pas dire que je connaisse tout par cœur non plus, mais grâce à cette page, je peux trouver la réponse en quelques secondes.
Les tableaux de ce genre sont parfaits pour refléter la réalité à un instant T, mais assez nuls pour vous aider à suivre l’évolution des données dans la durée. Enfin ça, c’est si vous tenez ce genre de tableaux avec Excel ou Google Sheets.
Parce que dans Notion, chaque ligne d’une base de données est elle-même une page, dans laquelle vous pouvez écrire ce que vous voulez. Et ça change tout ! Dans mon tableau ci-dessus, chaque poste de dépense est donc une page Notion dans laquelle je peux garder une trace de l’évolution de mes dépenses. Par exemple, voici le contenu de ma ligne/page de téléphonie mobile :
Une bonne partie de mes dépenses sont suivies et archivées de cette manière. Je vais sans doute passer pour un fou mais au moins, ça m’évite de prendre des décisions de consommation au doigt mouillé. Je le fais avec un bon niveau d’information. Et grâce à Notion, ça me demande très peu d’efforts.
Historique de matériel
En poussant cette logique plus loin, j’ai commencé à mesurer ce que me coûtent réellement certains produits. Le genre d’objets physiques qui peuvent coûter assez cher, mais sur lesquels j’investis pour plusieurs années. Le matériel informatique, par exemple.
Avec la multiplication des offres par abonnement, je trouve d’autant plus intéressant d’avoir une idée de ce que me coûtent mensuellement ce genre de produits. Ça donne une sorte de référentiel commun pour des choses qui sont difficilement comparables. Il n’y a rien de tel pour prendre du recul sur sa consommation, et réfléchir à la valeur de ce qu’on achète.
Par exemple, je peux vous dire qu’un de mes téléphones précédents (un Google Pixel) m’a coûté un peu moins de 32 € par mois, et que c’est presque trois fois plus que mon Nexus 5, que j’ai gardé 38 mois. C’est évidemment Notion qui fait les comptes à ma place.
Au-delà des éclairages financiers, je prends toujours un certain plaisir à documenter ma vie, et construire l’historique de tout ce qui s’y passe. Ça contribue au développement de mon second cerveau. Mon espace Notion est un peu ma bibliothèque géante.
Du coup, je fais ça pour un bon paquet de produits. Je ne vous montre pas la liste entière, ça risquerait d’achever ceux qui ne me prenaient pas encore pour un malade. Ça ferait un bon modèle de page Notion à proposer, cela dit.
💰 THE ULTIMATE FRUGALITY TEMPLATE! 💰
Si jamais je m’ennuie un jour, je pourrai toujours le proposer en échange d’un commentaire sur LinkedIn. Ça a l’air d’être la mode en ce moment.
Logiciel d’écriture
Notion est un excellent outil d’écriture. Son interface de composition n’a pas à rougir face aux meilleurs clients Markdown du marché comme Ulysses ou iA Writer. Elle est à la fois minimaliste et puissante, tout en apportant la dimension collaborative en temps réel, chère à Google Docs ou Dropbox Paper. Je suis toujours amoureux de Ulysses, mais j’écris de plus en plus de choses directement dans Notion.
L’expérience d’écriture est sublimée par les raccourcis clavier et le système de blocs. Le simple fait de pouvoir déplacer les paragraphes aussi facilement (par glisser-déposer) est une petite bénédiction. On ne dirait pas comme ça, mais essayez de faire la même chose sur Google Docs (qui ne supporte toujours pas le Markdown en 2020…), Medium, Word, ou même Dropbox Paper. Quand on commence à prendre goût à Notion, ça devient presque pénible de revenir sur ce genre de solutions.
Dans le même genre, réorganiser une page en jouant avec les > Menus dépliants
est assez pratique. Quand on y réfléchit, Notion est d’ailleurs un des seuls outils qui, par son design, incite à réécrire et réorganiser son texte. Il est quasiment plus jouissif d’améliorer sa page que de la créer. Si vous savez que la réécriture est l’essence de l’écriture, vous trouverez peut-être ça aussi intéressant que moi.
J’ai écrit la version définitive de mon livre avec Ulysses, mais Notion m’a énormément servi tout au long du processus d’écriture. Car tout projet d’écriture un peu sérieux (article, dossier, rapport, livre, essai, etc.) implique non seulement d’écrire le texte final, mais surtout des tonnes d’idées que vous allez passer votre temps à réécrire, manipuler et réorganiser. C’est encore un point où la flexibilité de Notion fait des merveilles.
J’écris généralement mes textes à l’endroit le plus proche du rendu final (pour mieux me mettre dans la peau de mes lecteurs), mais tout mon processus d’idéation et de recherches a lieu dans Notion. Par exemple, j’écris ces lignes dans WordPress, mais juste à côté, j’ai une page Notion avec un brouillon de tout ce que j’ai envie de raconter dans cet article. À chaque fois que j’ai une idée pour un article, elle se retrouve à l’intérieur de ce document de travail. Elle prend généralement la forme d’un élément de checklist que je pourrai cocher quand j’aurai exprimé mon idée convenablement. Si je n’ai pas décidé de la jeter entre-temps.
Ce document de travail fait lui-même partie d’une grosse base de données d’articles en préparation, organisée comme un calendrier éditorial. Quand j’aurai publié cet article, je déplacerai la page dans la colonne « Publié » de mon tableau Kanban.
J’aurais beaucoup aimé avoir un tel produit à disposition quand j’étais étudiant. D’ailleurs, si c’est votre cas, vous pourrez profiter de Notion gratuitement, à condition de fournir une adresse e-mail qui prouve votre appartenance à une école. Pareil si vous êtes prof.
Journal de bord
Allez, encore quelques mots sur l’écriture. Ceux qui s’intéressent à l’expression la plus connotée du monde (le développement personnel™) ont sans doute entendu parler du daily journaling, cette pratique consistant à coucher sur papier clavier vos pensées du jour. Des applications comme Day One en sont de bons catalyseurs.
Comme vous vous en doutez, c’est Notion qui me sert à écrire et archiver mes pensées quotidiennes. Avant d’aller dormir, je prends 5 minutes pour écrire le bilan de ma journée. Rien de très élaboré : une nouvelle page par jour, archivée dans une base de données du type calendrier. De quoi facilement retrouver dans quel état d’esprit je me trouvais à toutes les périodes de ma vie.
Pour être honnête, j’ai essayé le journaling à plusieurs moments de ma vie, en ayant souvent du mal rester constant dans la durée. Depuis que j’ai trouvé le bon workflow, j’arrive beaucoup plus facilement à m’y tenir. Je ne sais pas si Notion en est responsable, mais je suis sur une bonne lancée. Et je trouve toujours fascinant de relire mes notes quelques mois ou années plus tard.
CMS à portée de main
Si vous avez connu les débuts de ce site, vous vous souvenez peut-être que la première version était elle-même une page publique Notion ! J’avais déjà tout ce qu’il me fallait pour publier du contenu, et notamment une interface d’écriture géniale. Je pouvais facilement lier les pages entre elles et créer une navigation sur le site. J’avais même un moteur de recherche interne.
À vrai dire, il ne me manquait que deux choses importantes (qui sont d’ailleurs relativement liées) :
- une indexation correcte de mes pages par les moteurs de recherche ;
- pouvoir utiliser mon propre nom de domaine (
jonathanlefevre.com/articles/blablabla
plutôt quedjo.notion.site/blablabla-50c31cd8b29c492781e2f158e298eb2a
).
Le jour où Notion aura résolu ces deux problèmes, peut-être que WordPress ou Ghost pourront commencer à flipper. Parce que même sans ça, l’utilisation de Notion en tant que CMS est en train de devenir crédible.
Quand on voit ce qu’a prouvé l’équipe jusque-là, je ne serais pas surpris qu’ils trouvent des solutions élégantes à ces problèmes (aussi difficiles soient-ils). D’autant qu’ils y sont eux-mêmes confrontés pour leurs propres contenus publics, qui sont évidemment des pages Notion. Ils ont tout intérêt à ce que leur page Jobs ou leurs articles d’aide soient bien référencés par Google. En attendant, certains bossent déjà sur des solutions — plus ou moins complexes — pour utiliser Notion comme CMS avec son propre nom de domaine.
Avant même de voir débarquer la tendance du no-code, j’ai toujours été convaincu que la simplicité d’utilisation gagne toujours à la fin. Or, avec Notion, n’importe quel clampin a soudainement les compétences pour créer des pages web qui ont une bonne tête. Imaginez quand les moins technophiles vont comprendre que pour partager de l’information, ils ne sont plus obligés d’envoyer des fichiers powerpoint à des listes de diffusion. Avec un outil comme ça, nous n’en sommes peut-être plus si loin.
En attendant, on voit de plus en plus de gens qui utilisent Notion en guise de portfolio.
Cas d’usages infinis
Je me sers aussi de Notion pour gérer mes clients, écrire des procédures pour mon moi-même de plus tard qui aura tout oublié, piloter mes investissements financiers, gérer mes projets familiaux, lister mes idées de sorties ou de restaurants à tester, noter les escape game dans lesquels je vais, ou encore documenter tous mes apprentissages professionnels. Je vais m’arrêter là pour mes exemples, je pense que vous avez compris que les cas d’usage sont littéralement infinis. On commence sérieusement à toucher du doigt la vision d’Ivan Zhao : donner le pouvoir à n’importe qui de créer ses propres applications.
Pour chaque exemple que j’ai pris le temps de détailler, il existe à chaque fois des applications spécialisées qui font exactement la même chose. Parfois un peu mieux — heureusement pour elles. Sauf que là, Notion m’a permis de les créer moi-même, et de les façonner selon mes propres envies, sans connaissance technique particulière. Je me suis juste contenté de glisser-déposer des blocs. Bien sûr, s’amuser avec les bases de données relationnelles est un peu plus compliqué que créer une simple liste de tâches, mais vous comprenez l’idée.
L’intérêt étant qu’au lieu de disperser mes problèmes et mes données dans une multitude d’applications différentes, j’ai tout ce qu’il me faut au même endroit. Une bonne manière de consolider son savoir.
L’outil infaillible ?
Si je continue à faire les louanges de Notion, vous allez finir par vous demander si je ne travaille pas secrètement pour eux, ou s’ils n’ont pas sponsorisé cet article. J’en suis tellement loin que je n’ai même pas profité de ce papier roman pour placer mon lien de parrainage.
Non, comme toujours sur ce site, je suis juste enthousiaste à l’idée de raconter en quoi cet outil a — peut-être encore plus que les autres — changé ma vie. Est-il parfait pour autant ? Bien sûr que non.
Je ne vais pas revenir sur leur moteur de recherche, qui a longtemps été un boulet pour le produit, et qui est maintenant une tuerie. Problème résolu. La critique principale qu’on peut maintenant faire à Notion est qu’il reste une application web, ce qui implique une certaine lenteur par rapport à une application native comme Bear ou Ulysses.
À une époque, j’avais songé à basculer toute ma base de connaissances dans Ulysses, pour bénéficier de cette imbattable vitesse d’exécution. Mais les spécificités de Notion (le système de blocs, la flexibilité, les bases de données, le fait de tout pouvoir glisser-déposer n’importe quoi dans une page, etc.) me sont vite devenues indispensables. Elles compensent largement le léger manque de réactivité des pages Notion par rapport à une application macOS native. Et comme les pages Notion ont une URL, je peux les ouvrir très rapidement grâce à Alfred.
Forcément, mes bases de données qui contiennent des milliers de pages ne s’affichent pas aussi vite que mes pages les plus minimalistes. Mais globalement, je trouve Notion très performant pour une application web. C’est juste que ça reste une application web.
Là où c’est plus problématique, c’est sur mobile. Le temps de lancement de l’app Android est affreusement long, et pas du tout au niveau de l’expérience desktop. J’évite de bosser avec mon téléphone, donc ça ne m’embête pas plus que ça. Mais si vous avez l’habitude de produire beaucoup sur mobile, ça risque sérieusement de vous enquiquiner. On est bien loin du niveau de réactivité d’une app native.
Du coup, je n’utilise pas (encore ?) Notion pour les trucs où j’ai un besoin de réactivité maximal en mobilité, genre ma liste de courses. Maintenant que la recherche dépote, c’est sans doute ça le plus gros défaut de Notion : les lenteurs de l’app mobile. Les connaissant, ils y travaillent. Ils ont d’ailleurs récemment amélioré les performances de la version iPad.
Comme tout produit qui plaît à sa communauté d’utilisateurs, Notion a vite été bombardé de feature requests en tout genre. C’est encore plus violent pour un outil aussi multifacettes — bien qu’il ait déjà réussi à livrer une quantité hallucinante de fonctionnalités, sans jamais lésiner sur l’UX. Mais il manque encore pas mal de choses à Notion pour devenir complètement infaillible.
Je vous ai déjà parlé des noms de domaines personnalisés, sans doute dans le haut de la pile des fonctionnalités les plus demandées, à côté d’un mode hors-ligne digne de ce nom. Encore plus important selon moi : une API ! J’ai vu qu’ils ont récemment ouvert un poste de Developer Advocate pour accompagner la future sortie de cette API qui, si vous voulez mon avis, a tout le potentiel pour casser Internet.
Vivement que je puisse utiliser la recherche Notion directement depuis Alfred, ça va être génial. En attendant, ma solution alternative consiste à indexer mes pages préférées dans les favoris de mon navigateur, pour y accéder à la vitesse de la lumière. Comme dans le gif juste au-dessus. Il y a aussi un workflow non officiel qui fait bien le boulot.
Certains regretteront aussi l’impossibilité d’utiliser Notion avec son propre hébergement (sur les modèles de WordPress, GitLab, Ghost ou Discourse), même s’ils sont probablement une minorité à avoir les compétences et la disponibilité nécessaires pour gérer ce genre d’infra. Le modèle SaaS reste plus adapté aux besoins de la majorité des gens — moi le premier.
En tout cas, le choix de son application de prise de notes n’est pas à prendre à la légère. Accueillir et gérer tout votre savoir est loin d’être une mission anodine. L’outil qui gère votre second cerveau doit être suffisamment fiable et robuste pour vous accompagner dans la durée. Les apps changent, meurent, se font remplacer, et il n’y a bien que le texte brut qui sait traverser les années sans la moindre turbulence.
Pour être honnête, si Notion mourait demain, je serai probablement très malheureux. Ce serait bien plus douloureux que la mort subite de Mailbox, Sunrise ou Google Reader. Heureusement, le succès de la Notion est plutôt rassurant à cet égard, même s’il faudra prendre garde à ce que la folie des grandeurs ne les détourne pas de leur remarquable obsession pour l’UX. Ça n’a pas été le cas jusqu’à présent. Pourvu que ça dure.
Si jamais le produit venait à partir en sucette, on pourra toujours compter sur ses fonctionnalités d’exportation : je les trouve plutôt solides. Évidemment, les fonctionnalités qui font la puissance de Notion (comme le système de blocs ou les niveaux d’arborescence infinis) ne seront jamais importables dans une autre solution. C’est le jeu.
PKM is the new GTD
PKM n’est pas seulement l’acronyme du fondateur de PriceMinister, c’est surtout une des compétences les plus importantes de notre monde moderne : le Personal Knowledge Management.
La plupart d’entre nous travaillent dans une économie de la connaissance. Et justement, l’accès à la connaissance est de plus en plus facile. Les barrières de l’ancien monde sont toutes en train de s’effondrer. Aujourd’hui, n’importe qui peut suivre gratuitement les cours des meilleures universités du monde depuis son canapé. L’accès au savoir n’a jamais été aussi débridé.
De nos jours, le plus important n’est plus le nombre d’heures pendant lesquelles vous travaillez, la quantité d’efforts que vous fournissez, ou l’endroit depuis lequel vous bossez. Internet a profondément transformé ces paradigmes.
Ce qui compte le plus aujourd’hui, dans ce contexte instable où l’information est aussi fluide que foisonnante, c’est la façon dont vous organisez votre savoir. C’est votre capacité à assimiler de nouvelles compétences, et votre habileté à les transmettre. Voilà ce qu’on appelle le Personal Knowledge Management. Une compétence qui était autrefois réservée aux chercheurs ou aux élites intellectuelles, et qui est en train de devenir une des clefs pour survivre au futur du travail.
Au bout de 8000 mots, vous aurez sans doute compris ce que représente Notion à mes yeux : l’outil ultime de Personal Knowledge Management. Sa simplicité, son UX exceptionnelle et sa flexibilité infinie en font mon allié de choix pour organiser mes idées, mes pensées, mes notes, et tous les aspects de ma vie. C’est l’outil idéal pour accueillir mon second cerveau. Ça doit être pour ça que j’y passe l’essentiel de mes journées.
- Notion (web, iOS, Android) • https://notion.so
- Gestionnaire de jus de cerveau.
- J’utilise depuis 2017.
- Alternatives : Roam, Evernote, Bear, Ulysses, Dropbox Paper, Slite, Quip, Coda, AirTable, Google Docs, Apple Notes, OneNote, Supernote, Notable, GitBook, Org mode, Obsidian, Simplenote, StandardNotes, Milanote, Whimsical Docs, Craft, Mem, Guru, Tana…
Articles liés👇
- Raccourcis clavier de Notion
- Prendre des notes efficacement pour décharger son cerveau
- Qu’est-ce qu’un bon éditeur de texte ?
- SensCritique — Archiver sa consommation culturelle
- Alfred — Tout faire au clavier pour gagner du temps
- Gestionnaire de tâches
- Liseuse
- Klib — Gérer ses notes et surlignements Kindle
- Raccourcis clavier (macOS)
🙏 Merci pour votre lecture
Je sais que votre attention a beaucoup de valeur, dans ce monde où ceux qui essaient de la capter sont de plus en plus nombreux. Votre temps, lui, n’est pas extensible, alors ça me touche d’autant plus.
Si mes textes vous ont apporté quelque chose et que vous aimeriez rendre la pareille, le mieux est d’en parler autour de vous. Si vous êtes conscient du temps que ça représente, vous pouvez aussi m’offrir un thé.
💬 Commentaires et contributions
La transmission est souvent synonyme d’amélioration. Je partage mes façons de travailler pour que n’importe qui puisse me dire des choses comme : « Hey, c’est pas du tout optimisé ton truc là ! Pourquoi tu n’utilises pas plutôt cet outil ? »
L’optimisation est un chemin sans fin. On trouve toujours des moyens pour être plus efficace. Si quelque chose ne vous semble pas optimal, expliquez-moi comment je pourrais m’améliorer. 💙
Racontez-moi votre organisation, vos problèmes, vos outils favoris. Je pourrais écouter des gens m’exposer leurs workflows personnels pendant des heures.