Imaginons que vous êtes accro au sucre, et que vous souhaitez améliorer votre alimentation. Si vos placards sont remplis de friandises, vos résultats seront sans doute plus mitigés que s’ils étaient remplis de légumes.
Il est beaucoup plus facile de se débrouiller pour ne pas avoir de friandises dans ses placards, que de résister à la tentation quand elles sont là. Évidemment, rien ne vous empêche d’aller en acheter au supermarché du coin pour assouvir votre dépendance. Mais ça vous demandera un peu plus d’efforts que d’ouvrir un placard.
Plus il y a de friction jusqu’à la tentation, et moins il y a de chance que vous y cédiez. En fait, c’est la même chose pour toutes nos dépendances, y compris celle qui va nous intéresser ici. Moins il y a d’étapes pour accéder à la tentation, et plus nous y cédons facilement.
Briser la dépendance au téléphone
Il y a des chances que vous soyez déjà conscient de votre dépendance. C’est même la première étape pour s’en sortir. Or, résoudre ce problème est loin d’être une formalité. C’est difficile, parce que l’idée d’« affaiblir » son téléphone est conceptuellement déroutante. Dérangeante même, quand ce bijou technologique nous a coûté plusieurs centaines d’euros.
C’est difficile parce que d’un côté, notre téléphone nous procure des bénéfices incroyables, et peut nous simplifier la vie de façon déconcertante. Le revers de la médaille, c’est qu’il est aussi devenu notre distraction par défaut. L’aspirateur de notre attention dans une ère où nous ne supportons plus la moindre seconde d’ennui. Même quand nous n’avons que cinq secondes à perdre, il sera toujours là pour nous distraire.
Et oui, sur le moment, cette distraction n’est pas désagréable. Elle semble même idéale pour occuper ce temps mort où nous n’avions rien à faire de spécial. Mais à long terme, les effets de ces distractions sont dévastateurs. J’aime bien comparer ça à la junk food. Plaisant sur le moment, mais néfaste sur le long terme.
Un téléphone anti-distraction
Quelle est donc la vraie solution pour vaincre cette dépendance ? Certains adoptent une posture radicale pour que leur téléphone devienne véritablement « distraction-free » : désinstaller la plupart des applications. Y compris celles pour lesquelles la plupart des gens possèdent un smartphone aujourd’hui.
- Les applications de réseaux sociaux (Facebook, Twitter, LinkedIn, Instagram…). Si vous êtes arrivé jusqu’ici, vous savez probablement qu’elles fonctionnent un peu comme des machines à sous.
- Les applications de messagerie (Slack, WhatsApp, Telegram, Discord, Messenger…). Ils vont parfois jusqu’à désinstaller leur client mail.
- Les applications d’actualité (LeMonde, Les Échos, L’Équipe…).
- Les applications de streaming vidéo (YouTube, Netflix, Twitch…).
- Et même carrément le navigateur web (Chrome, Firefox…).
La démarche de Jake Knapp et John Zeratsky est assez remarquable. Je vous recommande d’ailleurs chaudement leur livre, Make Time, si ce sujet vous intéresse.
Néanmoins, je n’ai pas eu besoin d’être aussi radical pour me désintoxiquer de mon téléphone. Comme toujours, c’est une histoire de dosage, en fonction de sa sensibilité et de ses propres objectifs.
Déjà, j’ai toujours été desktop-first. Par principe, je n’ai jamais été très « tenté » par mon téléphone. Pour la plupart des tâches que j’ai besoin d’accomplir (même si elles sont purement récréatives), mon téléphone est sensiblement moins efficace que mon ordinateur. Si ça vous paraît étrange, peut-être que vous ne connaissez pas encore Alfred ou certains outils dont je parle sur ce site.
À moins d’être en mobilité ou dans une situation sociale ennuyeuse, je ne ressens pas particulièrement de dépendance à mon téléphone. Du coup, je ne suis pas allé jusqu’à désinstaller mon client mail, ni mon navigateur web. Je n’ai pas non plus viré TOUTES mes applications de messagerie. Dans la plupart des cas, l’absence de notifications me suffit pour garder une relation saine avec mon téléphone.
Cela dit, j’avais déjà la plupart des réflexes pour résoudre le problème à la source. Je n’ai jamais installé l’application Facebook sur mon téléphone, par exemple. Et ce ne sont pas les sessions inopinées de shoulder surfing dans le métro qui me feront regretter cette décision. Si jamais j’ai vraiment besoin d’aller sur Facebook, mon navigateur suffira largement.
Si votre niveau de dépendance est plus prononcé que le mien, alors il faudra possiblement sortir l’artillerie lourde, et supprimer toutes ces applications. L’avantage est que vous pouvez y aller progressivement, et que rien n’est irréversible. Faire le test pendant quelques jours sera déjà très bénéfique, et vous permettra de prendre du recul sur vos mauvaises habitudes.
Variante plus douce : compliquer l’accès à certaines applications
Même si je ne me sens pas vraiment accro à mon téléphone, j’ai quand même un péché mignon : Twitter. Je dois bien avouer que mon client Twitter sur Android (Flamingo, qui a depuis été tué par les limites de l’API) a toujours été une inépuisable source de distraction.
Et pour cause ! Twitter, c’est un accès libre aux pensées de toutes les personnes que je trouve intéressantes. Comment faire plus addictif que ça ? Je pourrais passer mes journées à lire les tweets de Jason Fried, Naval Ravikant, Shane Parrish ou toute autre personne qui aurait beaucoup à m’apprendre. Malheureusement, ça ne serait pas très efficace pour payer mon loyer ou faire avancer mes projets du moment.
Du coup, si vous n’avez pas envie de complètement désinstaller les applis qui vous rendent accro, vous pouvez déjà complexifier leur accès. C’est exactement ce que j’ai fait pour Twitter. Au lieu de se trouver sur mon écran d’accueil comme ce fut le cas pendant plusieurs années, le raccourci vers l’application est situé dans un écran secondaire, dans un dossier qui s’appelle « Drogues » (😅).
Pour moi, c’est le compromis qui fonctionne. Ce n’est pas une gigantesque friction, mais elle suffit à me faire privilégier autre chose que Twitter lorsque je déverrouille mon téléphone en quête de distraction rapide. Ma liste d’articles à lire dans Pocket, par exemple. Malgré tout, Twitter reste pour moi une distraction de qualité, compte tenu de l’usage que je fais des listes. Il faut juste que je veille à ne pas y passer trop de temps non plus.
Du reste, j’ai été surpris de voir à quel point ce petit changement a réussi à modifier une habitude aussi bien ancrée dans mon quotidien. J’en tire une bien meilleure satisfaction de long terme.
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Je sais que votre attention a beaucoup de valeur, dans ce monde où ceux qui essaient de la capter sont de plus en plus nombreux. Votre temps, lui, n’est pas extensible, alors ça me touche d’autant plus.
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